Avertissement

Le poème de cet opéra a été composé il y a prés de trois ans; il n'était encore question alors d'aucun autre ouvrage sur le mème sujet. Depuis cette époque, il en a paru plusieurs à divers théàtres. Le nôtre ne pent manquer d'avoir avec ceux-ci plus d'un point de rassemblance. Indépendamment des faits qui pour tous étaient les mêmes, on a puisé à des sources communes, dans Schiller et même dans Florian. Nulle part ailleurs que dans notre piéce, il est vrai, il n'est question de la présence d'une princesse autrichienne à Altdorf; mais cette fiction n'est pas précisément contraire à l'histoire. Beaucoup de chroniques rapportent que l'empereur Albert projetait de donner la Suisse en apanage à un des membres de sa nombreuse famille. (1) C'est ainsi que de nos jour, l'un de ses descendans avait institué pour gouvernant des Pays-Bas une princesse de sa propre maison.

On aurait pu offrir au lecteur une œvre plus régulière. Il ne s'agissait que de la publier telle qu'elle fut primitivement conçue; mais alors il eût fallu rétablir plusieurs scénes supprimées, remettre à leur place celles dont l'ordre a été interverti, et faire disparaître quelques passages que les besoins seuls de la musique ont exigés: alors aussi, la pièce imprimée eût été tout autre que la pièce représentée; et comme les spectateurs désirent surtout trouver dans la brochure ce que l'instrumentation ne permet pas de bien entendre, on a, pour la première fois peut-ètre, livré à l'impressison des paroles textuellement conformes à celles de la partition. Si d'un côté, par l'effet de cette résolution même, la critique trouve à moissonner dans un plus vaste champ, de l'autre, sans doute, le public nous saura quelque gré d'un léger sacrifice d'amour-propre qui doit tourner au profit de ses plaisirs. C'est aussi, nous l'avouerons, un hommage indirect qui s'addresse à notre illustre collaborateur. Il nous aurait répugné de faire disparaître même les vers défectueux que le rythme musical (parfois arrèté à l'avance) nous a contraints d'arranger tels qu'ils sont: il est d'ailleurs des accords d'une telle puissance qu'ils semblent consacrer les paroles auxquelles ils prétent leur magie. Au milieu de cette immense création toute nouvelle, qui fait enfin de Rossini un compositeur français, GUILLAUME TELL ne semble plus que l'ouvrage d'un seul, le sien. Si la communauté de travaux ne nous permet pas de lui offrir la dédicace de ce poème, que du moins, et pour en tenir lieu, nous puissons consigner ici le témoignage de notre admiration et de notre amitié.

(1) Albert fut le plus grand adversaire et persécuteur de la liberté des Suisses. Il avait grand nombre d'enfants: pour les avancer et enrichir, il commença a étendre sea ailes ou il lui fut possible, et spécialement il résolut de dresser une nouvelle principauté en Suisse. (République des Suisses, par Simler.)

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